Ouverture le dimanche de magasins alimentaires dotés de caisses automatiques : à quelles conditions ?

Un magasin de vente au détail de produits alimentaires doté de caisses automatiques peut être ouvert le dimanche après 13 h lorsqu’aucun salarié n’y travaille. Il n’est pas non plus soumis à l’arrêté préfectoral qui impose une journée entière de fermeture. Attention toutefois à ce que les agents de surveillance n’exercent pas les activités normalement attribuées aux salariés du magasin.

1ère affaire : des commerces de détail alimentaires ouverts le dimanche au-delà de 13 h

En principe, le repos hebdomadaire doit être donné le dimanche sauf dérogations (c. trav. art. L. 3132-3). Les commerces de détail alimentaire bénéficient d’une dérogation de droit, qui leur permet d’ouvrir le dimanche matin jusqu’à 13 h (c. trav. art. L. 3132-13 et R. 3132-8).

Or, dans une première affaire (cass. soc. 26 octobre 2022, n° 21-19075 FSB), l’inspection du travail avait contrôlé la société Casino dont plusieurs supermarchés en Haute-Garonne restaient ouverts le dimanche après 13 heures.

Les magasins en question étaient dotés de caisses automatiques. L’enseigne n’avait donc pas de salariés à partir de cette heure, les clients étant censés être autonomes.

Seuls des agents de sécurité de sociétés extérieures étaient présents, ce qui est parfaitement légal puisque les entreprises de surveillance et de gardiennage font partie des catégories d’établissement admis à donner le repos hebdomadaire par roulement à leurs salariés effectuant des services de surveillance (c. trav. art. R. 3132-5).

Selon les inspecteurs du travail, il y avait une violation de la règle du repos dominical. Ils avaient donc saisi le juge des référés afin qu’il ordonne leur fermeture le dimanche à 13 heures (c. trav. art. L. 3132-31).

Infraction car les agents de sécurité exerçaient les activités des salariés du magasin

La cour d’appel a ordonné la fermeture des 3 magasins à partir de 13 h et cette décision est confirmée par la Cour de cassation.

En effet, les agents de surveillance empiétaient sur les activités normalement dévolues aux salariés des magasins.

Ils orientaient les clients vers la hotline en cas de dysfonctionnement, aidaient les clients en difficulté avec la caisse automatique, par exemple en utilisant la « scanette » ou lors des paiements, rappelaient que les achats ne pouvaient se faire que par carte bancaire et sans vente d’alcool, renseignaient les clients sur les rayons ouverts ou non, procédaient au retrait des produits interdits à la vente, procédaient à l’ouverture des barrières en sortie de caisse si le ticket du client était inopérant, avaient en charge la fermeture du magasin, rangeaient les paniers, scannaient parfois les produits ou le ticket de parking à la place des clients, intervenaient directement auprès de l’assistance, procédaient au retrait d’un produit non acheté, renseignaient les clients dans le magasin ou appelaient un responsable en raison d’anomalies au niveau des caisses automatiques.

Du fait de la participation des agents de sécurité aux activités du magasin, les modalités de fonctionnement et de paiement n’étaient pas automatisées.

Les salariés étaient donc employés en violation des règles sur le repos dominical et peu importe à cet égard qu’il s’agisse de salariés de l’établissement ou d’entreprises de prestation de services, ni que de telles missions ne leur aient pas été demandées.

Autre affaire : un arrêté préfectoral imposait une fermeture soit le dimanche, soit le lundi

Dans les autres affaires (cass. soc. 26 octobre 2022, n° 21-15142 FSB et dans le même sens cass. soc. 26 octobre 2022, n° 21-15143 à 21-15146 D), un arrêté préfectoral du 12 février 1969 prévoyait que sur tout le territoire du Var, tous les magasins vendant des denrées alimentaires devaient être fermés à la clientèle une journée par semaine laissée au choix du chef d’établissement, à savoir, soit la journée entière du dimanche, soit la journée entière du lundi, soit du dimanche midi au lundi midi (c. trav. art. L. 3132-29).

Une telle journée de fermeture imposée par un arrêté préfectoral ne concerne pas les activités dont les modalités de fonctionnement et de paiement sont automatisées (c. trav. art. L. 3132-29).

Ici, les inspecteurs du travail avaient constaté que le supermarché Casino était ouvert le dimanche et le lundi toute la journée, contrevenant ainsi à l’interdiction posée par l’arrêté préfectoral.

Ils avaient saisi le juge des référés afin qu’il ordonne la fermeture du supermarché le dimanche.

Pas d’infraction car les agents de sécurité exercent leur seul rôle de surveillance

À l’inverse de la première affaire, la cour d’appel a rejeté la demande de fermeture.

La différence de solution est liée au rôle des agents de surveillance.

En effet l’automatisation du fonctionnement du magasin était bien confirmée, dans la mesure où l’inspection du travail ne démontrait pas que les agents de sécurité et de surveillance agissaient en dehors de leur fonction afin de participer au fonctionnement du magasin, pour son rangement ou l’assistance aux caisses. Ces agents de sécurité se contentaient d’exercer leur mission de surveillance.

Il n’y avait donc pas de violation des règles puisqu’ils n’étaient pas salariés de la société, mais intervenaient aux termes de contrats de prestation de services d’une entreprise bénéficiant d’une dérogation légale à la règle du repos dominical pour leurs salariés effectuant des services de surveillance (c. trav. art. R. 3132-5).

Cass. soc. 26 octobre 2022, n° 21-19075 FSB ; Cass. soc. 26 octobre 2022, n° 21-15142 FSB