Procédure de conciliation

L’entreprise qui en bénéficie doit, elle aussi, respecter le principe de confidentialité

 

Le dirigeant d’une entreprise qui a bénéficié d’une procédure de conciliation ne peut pas utiliser les documents issus de cette procédure contre un de ses créanciers dans un procès ultérieur.

De la conciliation à l’ouverture d’une procédure collective

La conciliation pour éviter l’ouverture d’une procédure collective

Une banque consent à une société une ouverture de crédit de 350 000 € et un prêt de 800 000 € dont le dirigeant se rend caution solidaire.

La société rencontrant des difficultés financières, une procédure de conciliation est ouverture et s’avère concluante. Un protocole de conciliation est alors mis en place, dans lequel le dirigeant contracte de nouveaux engagements de cautionnement solidaire au profit de la banque.

Pour mémoire, la procédure de conciliation permet à une entreprise en difficulté d’éviter sa mise en redressement judiciaire. Le conciliateur a, durant 4 mois au maximum (sauf prorogation accordée par le président du tribunal de commerce d’un mois supplémentaire), pour mission de négocier un accord amiable entre le dirigeant de l’entreprise et les créanciers de celle-ci (c. com. art. L. 611-6).

Les suites d’une conciliation sans succès

Finalement, l’accord de conciliation prévu entre la société et la banque n’est pas exécuté jusqu’à son terme. S’ensuit alors l’ouverture d’une seconde procédure de conciliation qui se solde par un échec, puis la mise en redressement judiciaire de la société. La situation de la société ne s’améliorant toujours pas, le redressement judiciaire est converti en procédure de liquidation judiciaire.

Le principe de confidentialité au coeur de la procédure de conciliation

Le comportement fautif de la banque durant la conciliation soulevé par le dirigeant en justice

La banque assigne le dirigeant en paiement de ses engagements de caution. Pour se défendre, celui-ci invoque alors le comportement fautif de la banque durant la seconde procédure de conciliation. Pour appuyer ses propos, le dirigeant communique plusieurs e-mails adressés par la banque au conciliateur qui démontrent, selon lui, les fautes de la banque.

Le dirigeant demande en conséquence des dommages-intérêts d’un montant équivalent aux sommes réclamées par la banque au titre des cautionnements.

La cour d’appel rejette cette demande, les e-mails échangés entre le conciliateur et la banque durant la procédure de conciliation étant couverts par la confidentialité.

Le dirigeant se pourvoit alors en cassation.

La confidentialité bénéficie à l’ensemble des parties prenantes à la conciliation

Le dirigeant soutient que l’obligation de confidentialité pesant sur les personnes appelées à la procédure de conciliation ne s’applique qu’à l’égard des tiers, et non entre les parties prenantes à cette procédure. Il pouvait donc opposer à la banque le contenu des échanges et son comportement dans le cadre de la conciliation, sans méconnaître son obligation de confidentialité.

Cependant, la Cour de cassation rappelle que toute personne appelée à la procédure de conciliation ou qui, par ses fonctions, en a connaissance est tenue à une obligation de confidentialité (c. com. art. L. 611-15). Ce texte est général et n’autorise pas une levée de la confidentialité entre les parties.

En conséquence, la Cour de cassation balaye l’argument du dirigeant et valide la solution des juges d’appel.

En pratique : La confidentialité attachée à la procédure de conciliation est primordiale pour le chef d’entreprise et la survie de son entreprise. Elle s’impose notamment aux journalistes financiers, qui peuvent toutefois passer outre lorsque leur article doit contribuer à l’information légitime du public sur un débat d’intérêt général (cass. com. 15 décembre 2015, n° 14-11500). Avec cette nouvelle décision du 5 octobre 2022, la Cour de cassation rappelle que le principe de confidentialité bénéficie à l’ensemble des parties prenantes à la procédure, y compris aux créanciers, aussi bien durant la procédure qu’après.

Cass. com. 5 octobre 2022, n° 21-13108